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Rien de plus prodigieusement comique que l’aventure de ce prisonnier rédigeant un long mémoire insipide, uniquement pour pouvoir l’étaler sur la table du juge, M. Villers, et, en bouleversant les imprimés, jeter un coup d’œil sur la formule des ordres de mises en liberté.

Rentré à Mazas, le filou écrivit une lettre signée « Villers », dans laquelle, selon la formule surprise, M. Villers priait le directeur de la prison de mettre le détenu Ballmeyer en liberté sur-le-champ. Mais il manquait au papier le timbre du juge.

Ballmeyer ne s’embarrassa pas pour si peu. Il reparut le lendemain à l’instruction, dissimulant sa lettre dans sa manche, protesta de son innocence, feignit une grande colère, et, en gesticulant avec le cachet déposé sur la table, il fit tout à coup tomber l’encrier sur le pantalon bleu du garde qui l’accompagnait.

Pendant que le pauvre Pandore, entouré du magistrat et du greffier, qui compatissaient à son malheur, épongeait tristement son « numéro un », Ballmeyer profitait de l’inattention générale pour appliquer un fort coup de tampon sur l’ordre de mise en liberté et se confondait à son tour en excuses.

Le tour était joué. L’escroc sortit en jetant négligemment le papier signé et timbré aux gardes de la souricière.