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du manoir, puis, sans nous regarder, comme se parlant à lui-même, répéta :

— Oui, c’est le premier soir que tout arriva ! Quand je fus monté dans ma chambre, — dans cette chambre que l’un de vous désire habiter cette nuit, — j’ouvris la fenêtre. La lune éclairait de ses rayons pâles la solitude sauvage des plateaux. Je regardai cet affreux désert où, désormais, il me faudrait vivre, j’écoutai mon cœur qui était si pitoyable… si désemparé, Messieurs, que j’en eus pitié et, quand je refermai la fenêtre, j’avais résolu de me tuer.

Mes pistolets se trouvaient sur la commode ; je n’eus qu’à allonger la main… Ah ! j’oubliais de vous dire que j’avais amené de Paris mon dernier ami… mon chien fidèle… une chienne que j’avais trouvée, une nuit que je rentrais du tripot en maudissant le Ciel, couchée devant ma porte… Comme je ne savais d’où elle venait ni à qui elle avait appartenu, je l’avais appelée « Mystère » … Dans le moment même où je prenais mes pistolets, elle se mit à hurler dans la cour… à hululer… mais d’un hululement tel que je ne saurais le comparer à rien… elle hurlait comme je n’ai jamais entendu hurler le vent… excepté ce soir… « Tiens ! pensai-je, voilà Mystère qui hurle à la mort… elle