équilibre qui lui échappait. Décollé de la muraille, il se penchait vers moi comme s’il avait décidé de me tomber dans les bras. Logiquement, de par le simple exercice des lois de la pesanteur, cette armoire devait, me semblait-il, continuer son inclinaison jusqu’à ce qu’elle eût rencontré le carreau de la chambre, en un fracas nécessaire. La prudence me commandait de n’y point toucher, mais ayant sans doute ce soir-là, comme on dit, le diable au corps, je posai ma bougie sur la commode, repoussai l’armoire contre la muraille, cherchai d’une main dans ma poche un objet qui pût me servir de cale, y trouvai mon couteau de chasse, le jetai sur le parquet et, du bout de mon pied, assurai par ce moyen l’équilibre certain de cette armoire en goguette.
Quand, fier de mon ouvrage et persuadé que j’avais épargné à ce joli meuble un accident menaçant, j’eus repris ma bougie et me fus retourné pour fermer la porte, je revis l’armoire dans son inclinaison première.
— Ah ! vraiment ! fis-je assez étonné ; mais comme, en bas, Makoko inquiet de mon absence m’appelait, je descendis.