Page:Leroux - La maison des juges.djvu/75

Cette page a été validée par deux contributeurs.
67

Le Réquisiteur général. — Oh ! mon ami, nous ne voulons pas vous déranger, mais nous avons tenu, dans une aussi triste circonstance.

Jean, se laissant aller, avec une lassitude immense, sur le siège qui est devant son bureau. — Merci.

Le Grand Réquisiteur. — Est-ce que M. le président et vous, avez pris une décision pour les obsèques.

Jean. — Aucune ! Mais je pense qu’elles seront très simples… très simples… la famille… la famille seulement !

Le Grand Réquisiteur. — La famille ! Évidemment !… et une petite délégation du parquet.

Jean, très bas. — Je parlerai de tout cela avec mon père, monsieur le grand réquisiteur

Le Réquisiteur général. — Comme vous voilà abattu, mon pauvre ami… Que diable ! un peu de courage !

Le Grand Réquisiteur. — Ce coup a frappé très douloureusement, M. l’avocat général… Nous lui accorderons un long congé… Du reste, vous avez beaucoup travaillé depuis la rentrée… beaucoup ! Vous avez droit à un peu de repos, monsieur l’avocat général !

Jean. — J’en prendrai après le procès Tiphaine !

Le Grand Réquisiteur, stupéfait et hostile. — Le procès Tiphaine ?… Mais, monsieur l’avocat général, votre deuil ne vous permet pas décemment de remplir le rôle du ministère public.

Jean, affirmant, n’interrogeant pas. — C’est votre avis, monsieur le grand réquisiteur !

Le Grand Réquisiteur. — J’espère que vous m’avez compris… Vous avez reçu, hier, M. le juge d’instruction Leperrier d’une façon bien étrange. Et pourtant, M. le réquisiteur général et moi, nous avions pris la peine de venir ici, vous prier de l’écouter. Vous ne l’avez pas écouté. Vous ne savez même pas ce qu’il avait à vous dire !

Jean. — Si…

Le Grand Réquisiteur. — Ah ! alors, comprenez donc qu’il vous faut prendre votre congé tout de suite, monsieur l’avocat général ! Il convient que vous vous consacriez entièrement à la douleur que vous cause une si grande perte.

Jean. — Messieurs les grands réquisiteurs, j’ai