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bert et Me  Aga… Nous sommes revenus avec eux… nous les avons reconduits.

Béatrice, avec affectation. — Oh ! la joie folle de glisser, d’être deux à avoir l’unique désir du même chemin, de la même courbe, de la même fuite sur la glace. Et puis, il est des instants où l’on est comme immobile dans la vitesse, avec le grand vent frais sur le visage. (Regardant amicalement Marie-Louis sans coquetterie.) … et le bras de notre bon Marie-Louis à la ceinture !…

Jean, se levant, très agité. — Il faudra, il faudra, Béatrice, retourner sur les lacs glacés avec Marie-Louis. Cela est excellent pour votre santé, et je me félicite de retrouver chez vous une humeur que je ne connaissais plus depuis longtemps…

Béatrice. — C’est entendu ! Nous y retournerons demain… C’est Marie-Louis qui m’a appris à patiner. C’est un excellent professeur !

Jean, d’une brutalité soudaine. — Vous resterez à la maison ! On ne sort pas en ce moment de la maison des juges ! Qui vous fait sourds ainsi tous les deux que vous n’entendiez pas ce que l’on crie dans la rue !… Vous resterez à la maison !

Béatrice. — À la maison !… Je resterai à la maison ?

Marie-Louis. — Mais, Jean ! Qu’est-ce que cela signifie ?

Béatrice. — À la maison !…

Le Président. — Béatrice, je vous en prie… il faut pardonner à Jean.

Béatrice, continuant, à Jean. — Mais vous me croyez donc bien votre prisonnière pour me parler de la sorte ?

Jean, revenu au calme. — Excusez-moi, Béatrice, je regrette de toutes les forces de mon âme cette stupide colère… L’heure est si triste pour nous… je n’ai pas su me contenir.

Le Président. — Vraiment, Jean, tu es très-coupable… L’épreuve passagère que nous subissons n’est pas une raison suffisante de ta soudaine irritation contre Béatrice… Je ne te reconnais plus… Il faut qu’il se passe dans ton esprit quelque chose que je ne sais pas. Toi ordinairement si calme !… Voyons, qu’y a-t-il ?

Jean. — Eh ! vous le savez bien, mon père…

Le Président. — Non, ce n’est pas cela… il y a autre chose…