Jean. — Comment ! Tu ne sais pas ! Serais-tu malade ?
Marie-Louis. — Oui.
Béatrice, inquiète. — Vous souffrez ?
Jean. — Pourquoi ne nous as-tu pas prévenus ? Qu’as-tu ?
Marie-Louis. — Oh ! Je ne suis bien malade que depuis ce matin.
Jean. — C’est ce matin qu’on a exécuté Jacquart, à Melun ?
Marie-Louis. — Oui, à six heures, devant la porte du cimetière.
Jean. — Es-tu malade de cela ?
Marie-Louis. — Oui.
Jean. — Ce Jacquart avait assassiné une vieille femme.
Marie-Louis. — Ce Jacquart avait dix-neuf ans et c’est épouvantable de se dire qu’on a fait tomber une tête de dix-neuf ans !
Jean. — Je crois qu’il est encore plus affreux de se dire qu’il y a des assassins de cet âge !… Remets-toi, Marie-Louis. Ton émotion du reste est toute naturelle. C’est la première fois, n’est-ce pas, que tu réclames la peine capitale et que tu l’obtiens ?
Marie-Louis. — Oui, une première tête… Ma première tête !… Je ne suis réellement magistrat que depuis ce matin…
Jean. — Oh ! Marie-Louis ! Comment peux-tu plaisanter avec une chose aussi terrible ?…
Marie-Louis. — Plaisanter ! Ah ! Dieu m’est témoin… Regardez-moi et dites-moi si j’ai la mine d’un homme qui plaisante. Tu ne vois donc pas que j’ai peur !…
Jean. — Peur de quoi ?… des fantômes ?…
Marie-Louis. — Oui, c’est cela… (Il se lève.) des fantômes ! Oh ! ne souris pas !… (Il va à Béatrice.) Savez-vous, Béatrice pourquoi je suis venu ici, ce soir !… Je vais vous le dire, à vous, et vous ne sourirez pas !… Parce que j’avais peur de passer la nuit, tout seul, dans ma petite maison de Melun…
Béatrice. — Mon pauvre ami…
Marie-Louis. — Oh ! oui, plaignez-moi…
Jean. — C’est de l’enfantillage !…
Marie-Louis, il revient à Jean. — Eh ! non ! C’est de la peur !… Il faut que je te dise qu’il m’est arrivé