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LA POUPÉE SANGLANTE

ne vous apprendrais rien des bruits qui courent dans les arrière-boutiques du quartier.

Christine releva la tête et sourit ; tout fut de nouveau illuminé a giorno.

— Reparlons sérieusement, je vous prie… Sur la paille, nous le sommes donc !… et je vais vous dire tout de suite de quoi nous vivons… Je vous ai déjà prouvé que je vous connaissais mieux que vous ne l’imaginiez… je vais vous prouver maintenant que je vous considère comme un ami… (sa figure devint extraordinairement grave)… oui, je vais vous parler comme à un ami, comme à un frère ! (c’est cela ! je m’y attendais !… comme à un frère !… c’est toujours comme à un frère que ces dames me parlent)…

»… Nous sommes à l’entière disposition de notre propriétaire… le marquis de Coulteray… Nous lui devons plusieurs termes… il peut, si bon lui semble, nous mettre à la porte demain ! S’il ne le fait pas, c’est à cause de moi !… le marquis de Coulteray me fait la cour !… (Comment ! encore un ! Et elle est venue pour me dire cela !… Il me semble que la madone de l’Île-Saint-Louis est bien occupée entre son fiancé, le cadavre de son Gabriel, son marquis et son frère : le relieur d’art de l’Île-Saint-Louis ! Ô Christine ! énigme de plus en plus indéchiffrable !)… une cour très convenable… du moins jusqu’à présent… Ma présence chez lui lui plaît… il prétend même qu’elle lui est nécessaire… Je passe quelques heures tous les jours dans son hôtel, sous prétexte de petits travaux à effectuer… des étains… de la ferronnerie pour de vieux lutrins… des ciselures pour antiphonaires. Sa bibliothèque est unique… vous verrez !

— Ah ! je verrai cela !… fis-je pour dire quelque chose et d’un air tout à fait désemparé.