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LA POUPÉE SANGLANTE

sière !… C’est d’autant plus incompréhensible que la belle Christine est toujours propre comme un sou neuf… Ah ! c’est pas elle qui balaie, bien sûr !… Tenez, il n’y a qu’un homme que j’aie vu, avant vous, pénétrer dans l’atelier, en dehors bien entendu du vieux Norbert et de son neveu. C’était, il y a de cela deux mois… j’en ai parlé à Mlle Barescat… oh ! un drôle de type… il était habillé avec un manteau qui l’enfermait des pieds à la tête, et il avait des bottes…

— Eh bien ! vous voyez qu’ils reçoivent des étrangers, dis-je en essayant de conserver à ma voix le ton le plus naturel, bien que je fusse singulièrement ému par la dernière déclaration de la femme de ménage.

— Pour étranger, ça se pourrait bien qu’il soit étranger… Il en avait l’air… On ne s’habille plus comme ça chez nous… Il avait un chapeau noir à boucle, comme on en voit au cinéma dans les drames du temps de la Révolution… Ma foi ! on aurait dit un comédien… un beau garçon du reste, mais je n’ai pas eu le temps de le voir beaucoup… C’était un après-midi où j’étais venue par hasard et comme ils ne m’attendaient pas… Ils l’ont fait filer tout de suite… Il était assis dans le jardin… Mlle Christine l’a entraîné dare-dare dans l’atelier… le neveu les a suivis là-haut… Quant au vieux, il m’avait déjà saisie par le poignet et me ramenait dans sa boutique, et j’aurai toujours dans l’oreille le ton sur lequel il m’a demandé : « Eh bien ! que voulez-vous, mère Langlois ? » Et là-dessus, quel coup d’œil !

» Je lui ai répondu : « Je vous demande bien pardon de vous avoir dérangé, m’sieur Norbert !… je ne savais pas que vous aviez de la visite ! »

» Il a grogné je ne sais quoi entre ses dents, je