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LA POUPÉE SANGLANTE

la cérémonie définitive), l’empouse n’aurait pas pu s’échapper, venir se promener la nuit dans Coulteray… Eh bien ! on allait donner satisfaction au populaire… On allait ouvrir la tombe, montrer à tous la dépouille mortelle de Bessie-Anne-Elisabeth et, devant tous, refermer cercueil et tombeau et cimenter la pierre qui le recouvrait.

» Enfin, le curé viendrait en grande cérémonie prononcer les paroles d’exorcisme.

Ainsi fut fait et tout le monde pour le moment fut calmé. Christine revit encore une fois son amie et, en vérité, qu’une morte si bien morte se fût offert, la nuit précédente, une promenade qui avait tant fait parler d’elle, voilà ce qui acheva de lui brouiller les idées ! Elle ne savait plus ce qu’elle avait vu !… ni si elle avait vu !… quant à Drouine, il était plus sombre que jamais et il ne fallait pas lui parler d’hallucination, ni particulière, ni collective… Il avait vu la morte sous ses fenêtres ! Il avait vu le tombeau vide !… Jacques dut le faire taire…

Christine, dont l’état de faiblesse était extrême, eût voulu partir le soir même de ce jour qui comptera à jamais dans les annales de Coulteray et où la légende de l’ « empouse » reprit une force qui rayonna jusque dans les provinces limitrophes si bien que les visiteurs affluèrent dans le pays dans des proportions telles que la fortune d’Achard, l’aubergiste, fut faite et aussi celle du successeur de Drouine, qui ne manquait pas de raconter l’histoire de l’ « empouse » comme si elle lui était arrivée, à lui…

Pour en revenir à Christine, elle fut prise, le soir même, en rentrant au château, après la cérémonie de l’exorcisme, d’une étrange torpeur qui provenait peut-être simplement de son état de faiblesse. Elle fut se coucher et ne sortit de cet