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LA POUPÉE SANGLANTE

désespérément, sourdement, lugubrement, dans un râle de femme qui se noie.

Jacques accourut, la trouva se traînant à terre, dans un désordre qui l’eût laissée demi-nue, sans son admirable chevelure qui s’était déroulée et l’enveloppait de sa vague protectrice. Il put croire qu’elle avait roulé de sa couche, poursuivie par un affreux cauchemar auquel elle était encore en proie. Et il n’en douta point, quand il l’entendit prononcer, entre deux hoquets de terreur, cependant que son bras rigide désignait la fenêtre et la lointaine campagne lunaire :

— Elle ! Elle ! je l’ai vue !… Elle se promenait dans le cimetière !… Mon Dieu ! que va-t-elle faire ? que va-t-elle faire ?

Il enveloppa Christine, chastement, dans un manteau et la déposa sur le lit.

Il essaya de la calmer par de bonnes paroles.

— Voyons, Christine, réveille-toi, ma chérie !… Sors de ce mauvais rêve !

Mais, âprement, elle lui répliquait :

— Je ne dors pas !… je ne rêve pas !… Je te dis que je l’ai vue… comme je te vois !… Elle a glissé le long du mur de la chapelle… Elle allait chez Drouine, c’est sûr !

Ainsi quelques minutes se passèrent tandis qu’ils essayaient de se convaincre l’un et l’autre.

— C’était à prévoir… ça devait finir comme ça ! gronda Jacques… du moment que nous restions ici, impressionnable comme tu l’es maintenant !… Cette crise est aussi logique que le développement d’un panaris.

Il avait à peine achevé que des coups sourds, répétés, retentissaient au rez-de-chaussée. Il voulut courir à la fenêtre, l’ouvrir pour savoir ce que c’était… Mais elle lui avait jeté ses bras