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LA POUPÉE SANGLANTE

pâle, que le terrible marquis avait ramenée des Indes.

Un malheur présent est égoïste ; il exige tous vos soins, vous courbe sur ses plaies et ne vous permet de regarder autour de vous que lorsque celles-ci commencent à se refermer… Enfin, il ne faut pas oublier non plus qu’à tout prendre, la réalité de l’infortune de là marquise de Coulteray était encore à démontrer… Certes, le « trocard » avait produit son effet ; restait à savoir si on ne lui avait pas accordé une importance exagérée ou départi un rôle qui était bien le sien !…

Quoi qu’il en fût, dans le tumulte sanglant de l’affaire de Corbillères, le « trocard » que Christine avait emporté dans son sac pour le montrer à Bénédict avait disparu ! Où ? quand ? comment ?…

Sans doute au moment où Christine courait dans le marécage, à demi soulevée par la terreur et par le vent ? Alors le sac se serait ouvert et le pistolet chirurgical s’en serait échappé ?

Ces questions, Christine et Jacques ne se les posèrent que lorsque le mot si bref et si lugubre de la marquise leur fut parvenu.

La vision de la petite Anie brûlant dans la « cuisinière » de Bénédict Masson avait si bien effacé tout ce qui ne se rapportait pas directement ou semblait ne pas se rapporter aux crimes de Corbillères que Christine n’avait parlé de ce singulier trocard à quiconque.

… Aussi bien il n’avait été retrouvé par personne, en dépit de toutes les investigations de la police judiciaire, qui fouillait tout Corbillères et son marécage, à la recherche des restes des six victimes manquantes… Si les agents de la Sûreté générale avaient découvert un objet aussi curieux, ils en auraient certes fait état.