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LA POUPÉE SANGLANTE

une vieille tante et qu’elle voulait gagner sa vie. Elle me proposait d’être en même temps mon élève et mon employée. L’affaire fut vite conclue. Je possède aux environs de Paris une petite villa, à l’orée d’un bois, à quelques pas d’un étang, dans un endroit assez désert ; mais j’aime la solitude ; j’imaginai sans peine que je l’aimerais davantage avec cette jolie fille. C’est là, du reste, que je travaillais tous les étés. J’y donnai rendez-vous à Henriette pour le lendemain.

Ce soir-là, je m’étais tenu dans la pénombre. Le lendemain, à la campagne, elle put me voir, au grand jour. Tant est que le surlendemain, je ne la revis plus !… Je l’attendis trois jours. Elle m’avait donné l’adresse de sa tante. J’allai chez cette tante et lui demandai des nouvelles de sa nièce, elle me répondit avec assez d’indifférence, du reste, qu’elle ne l’avait pas revue. Je n’insistai pas. Je ne voulais pas avoir l’air plus inquiet qu’elle-même.

Sur ces entrefaites, une autre élève femme vint se présenter, Mme Claire Thomassin, une veuve, jeune également et jolie… Elle resta chez moi un jour… Cette fois, ce fut un monsieur dans les cinquante ans, qui vint, quarante-huit heures plus tard, me poser des questions sur Mme Claire. Je lui répondis que je n’avais plus eu de ses nouvelles depuis son départ de chez moi. Il s’en alla, fort triste.

Eh bien, j’ai encore eu quatre élèves femmes… L’une est restée cinq jours, deux autres pas plus de vingt-quatre heures, la dernière est restée trois semaines. Avec celle-ci, j’ai pu croire que le miracle allait s’accomplir ; eh bien, au dernier moment, elle s’est éclipsée, comme les autres !

Pour cette dernière, j’ai voulu en avoir le cœur