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LA POUPÉE SANGLANTE

» Mais Catherine était restée immobile, cachée derrière une haie de roseaux, à quelques pas de moi, dont elle ne soupçonnait pas la présence… Maintenant Bénédict l’appelait d’une voix de colère, et comme Catherine ne répondait toujours pas, il referma la porte avec fureur.

» Alors, Catherine se releva et courut dans la direction de la gare. Je la suivis et la rejoignis dans un moment où elle s’était égarée dans l’obscurité :

» — Ne craignez rien ! lui dis-je… je suis là !… c’est moi le garde, le père Violette… qu’est-ce qu’il vous a encore fait le misérable ?

» — Mais rien, me dit-elle… seulement il me fait peur !… Il a, au contraire, été très gentil !…

» Je ricanai…

» — Vous êtes la sixième, fis-je, avec qui il est très gentil… et elles s’en vont toutes !

» — C’est ce qu’il m’a dit.

» — Elles s’en vont toutes au bout de vingt-quatre heures… de deux jours… de trois jours… Vous, voilà huit jours que vous êtes là !… Vous avez de la patience !…

» — Il m’a encore dit ça !…

» — Pourquoi restez-vous ?…

» — Parce qu’il est très malheureux !… Il est à plaindre, le pauvre garçon !… Il pleure… j’ai eu pitié de lui…

» — Et vous en avez assez maintenant ?

» Elle ne me répondit pas…

» — Pourquoi vous êtes-vous enfuie ce soir ?…

» — Parce qu’il a voulu m’embrasser !…

» — Il n’est pas dégoûté, fis-je, mais vous, je comprends que vous le soyez un peu…

» Là-dessus, elle garda le silence. Et, comme elle s’était arrêtée, je lui dis :

» — Si vous voulez prendre le train de dix