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LA POUPÉE SANGLANTE

— Je vous avouerai, fis-je, avec un peu d’humeur, que je ne pensais plus à cette malheureuse… Pourquoi me demandez-vous cela ?…

— Parce que…

— Parce que… quoi ? N’étions-nous pas d’accord là-dessus ?… Pouvons-nous autre chose pour elle que la plaindre ?

— Oui, oui !… la plaindre !… répéta-t-elle avec sa voix de rêve… Elle n’a pas su résister, elle !… résister à l’ambiance !…

— Que voulez-vous dire ? Expliquez-vous, Christine ?

— Mon cher Bénédict, si je vous dis cette chose à laquelle j’étais cependant résolue à n’attacher aucune importance, c’est à cause d’une certaine coïncidence dont je ne laisse pas d’être assez troublée, je l’avoue…

— Vous m’intriguez, Christine… (Pendant ce temps sa main était toujours dans la mienne et cela m’inspirait des pensées telles que j’avais le plus grand mal à la suivre.)

Eh bien ! moi aussi, j’ai été piquée !…

— Seigneur Dieu !… Expliquez-vous, Christine, expliquez-vous !

Oui, j’ai été piquée par le rosier… Oh ! il y a quelque temps de cela !… Et au bras, comme elle, et au même endroit qu’elle !… Et avant elle !…

J’essayais de voir son visage, mais elle le tenait penché et détourné de moi…

— En vérité ! en vérité !… voilà une bien grande aventure ! déclarai-je assez froidement… Vous vous êtes penchée à la même fenêtre, comme elle s’y est penchée elle-même et vous avez été piquée par le même rosier !… C’est là quelque chose de tout à fait extraordinaire !…

— Non ! releva-t-elle doucement, toujours de