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LA POUPÉE SANGLANTE

— Courez ! mais courez donc !…

Enfin, dans le vestibule, dans l’escalier, dans tout l’hôtel, un tumulte de galopade et de meubles bousculés, renversés…

Je me précipitai sur la porte qui résista. Christine m’appela :

— Par le jardin !… par le jardin !…

Et nous nous jetâmes dans le jardin qui communiquait par une petite allée latérale avec la cour d’honneur dans laquelle nous arrivâmes, haletants…

Sur le seuil de la voûte sombre, dont la porte était fermée, se tenait le noble vieillard, qui paraissait fort ému et restait là, planté sur ses pieds, comme s’il eût été incapable de faire un mouvement.

Aussitôt qu’il nous aperçut, il nous cria :

— Ne vous mêlez pas de ça !… Ne vous mêlez pas de ça !… C’est encore madame la marquise qui a une de ses crises !…

Mais nous passâmes outre et, gravissant quatre à quatre le perron, nous entrâmes dans l’hôtel.

Tout le bruit était maintenant au premier étage.

Dirigés par le tumulte, par un grand bruit de porte brisée, défoncée… nous fûmes bientôt dans un corridor qui donnait sur les appartements de la marquise… Une porte gisait là, crevée comme par une catapulte. La chambre de la marquise… La malheureuse gémissait, se débattait entre les mains du marquis… Elle avait une toilette de demi-gala en lambeaux… Ses éternelles fourrures gisaient sur le parquet, à ses pieds, comme un tapis de neige… Et elle était plus blanche que ses fourrures, aussi blanche que la neige…

Sing-Sing, dont les yeux de jade brûlaient d’un