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LA POUPÉE SANGLANTE

nous soyons chez nous, à ce que nous ne soyons dérangés par personne.

— Ah ! oui !

— Il tient si bien à cela, fit-elle en se dirigeant vers la porte qui donnait de la bibliothèque sur le petit vestibule, que cette porte est fermée, condamnée… Il n’y a plus que lui qui puisse pénétrer ici…

— Vraiment ? fis-je un peu étonné… Voilà bien des précautions !

Il ne veut pas que la marquise vienne vous ennuyer !

— Oh ! j’ai compris !

J’aurais dû me réjouir de cet isolement dans lequel on nous laissait désormais, Christine et moi ; cependant les circonstances assez obscures dans lesquelles l’événement se produisait… et la pensée de cette autre isolée qui agonisait là-haut, épuisée par une folle imagination, me causèrent une sorte de malaise que je n’aurais su définir, mais que l’on éprouve généralement à la veille de quelque malheur dont on a le vague pressentiment… De fait, un bien singulier et même tragique incident vint, quelques minutes plus tard, nous bouleverser, Christine et moi, à un point que je ne saurais dire…

Nous avions commencé de travailler, une fenêtre ouverte sur le jardin, quand, tout à coup, nous fûmes surpris par un grand cri de douleur qui emplit tout l’hôtel…

Christine et moi nous nous étions dressés, aussi pâles l’un que l’autre… Nous avions reconnu la voix de la marquise…

Et puis ce furent des gémissements, des appels, les cris gutturaux de Sangor, le miaulement de Sing-Sing et, par-dessus tout, les ordres brefs, répétés, rageurs du marquis :