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LA POUPÉE SANGLANTE

aucune difficulté pour me donner cette clef, paraît-il, car je n’étais pas là quand elle la lui a demandée… Il me l’a remise à moi, le plus naturellement du monde :

— Comme cela, vous viendrez quand vous voudrez !… Vous êtes chez vous.

Ceci se passait hier… Je dois remettre la clef à Christine aujourd’hui… Mais il est cinq heures du soir et elle n’est pas encore arrivée… Depuis quelques jours, elle se fait plus rare et j’imagine que Gabriel doit réclamer ses soins…

La santé de ce cher mystérieux garçon doit être meilleure, si j’en crois les belles couleurs de Christine…

L’intervention chirurgicale l’aura définitivement sauvé… et je ne désespère pas de le revoir se promener dans le petit enclos des Norbert, au bras de sa belle infirmière…

Chose inouïe ! Il me semble maintenant que je vais haïr Christine !… et savez-vous pourquoi ?… Ô mystère du cœur humain ! comme dit l’autre… parce qu’elle trompe, pour ce bellâtre, un Jacques Cotentin !…

Maintenant que j’ai pénétré un peu dans ce cerveau-là, oui, oui, Christine ne m’apparaît plus que comme une poupée haïssable, méprisable, odieuse !… Si elle ne l’aime pas, elle n’avait qu’à ne rien lui promettre ! ou si elle ne l’aime plus, elle n’a qu’à le lui dire ! Mais tromper un homme pareil !… Attention !… la voilà !… Quelle jeunesse !… Comment Gabriel ne guérirait-il pas avec ce sourire à son chevet ? Cette belle main tirerait un mort du tombeau !

À propos de mort et de tombeau, je n’ai toujours pas revu la marquise… et par conséquent je n’ai pas eu à me préoccuper de prétextes plausibles pour ne point lui rendre toutes ses vieilles