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LA MACHINE À ASSASSINER
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de la guimauve et des quatre-fleurs, l’ange conservateur de la bourrache et du romarin passa son auditoire en revue. Il le méprisait du reste profondément, ce que nous avons pu voir à certaines reparties moins humoristiques que peu respectueuses pour le sexe auquel M. Birouste avait dû sa mère. Enfin, ces dames étaient attentives. Il les regarda avec sévérité :

— Ne parlez jamais légèrement des hommes de science !… Vous me mettez « hors de mes gonds » quand je vous entends traiter de carabin un Jacques Cotentin !… Jacques Cotentin, mesdames, est un grand savant !… Si vous ne le savez pas, permettez-moi de vous rapprendre !… Il a publié des articles que vous ne sauriez comprendre, mais qui m’ont fait réfléchir, moi !… Je sais d’autre part que l’École de médecine a les yeux sur lui et que l’on attend de ses travaux un de ces miracles qui datent dans l’histoire de l’humanité !… Lequel ?… je ne saurais préciser !… La présence chez lui de cet étrange malade, que Mme Langlois nous a dit s’appeler Gabriel, se rattache-t-elle à ce miracle-là ?… C’est possible ! D’autres doivent être renseignés… j’ai un neveu, le petit Célestin que vous connaissez, qui a commencé par travailler chez moi, qui fait sa médecine, qui fréquente « les travaux pratiques » de l’école, qui connaît Baptiste et qui en a entendu parler là-bas comme d’un aide précieux et fort mystérieux chargé de mettre à la disposition de Jacques Cotentin des pièces anatomiques qui lui sont livrées par certains professeurs, dans des conditions tout à fait exceptionnelles…

« Ces pièces anatomiques, encore toutes frémissantes de la vie, permettent sans aucun doute au jeune prosecteur de se livrer à des expériences in anima vili en rapport avec les théories qu’il n’a fait qu’aborder dans ses remarquables communications à la Nouvelle revue d’anatomie et de physiologie humaine… Ces théories posent nettement la question : « Où finit la vie ? où commence la mort ?… » et savez-vous bien qu’avec sa restauration possible de