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GASTON LEROUX

cour, saluée par le concierge galonné qui refermait cette grille derrière elle.

L’auto enfila à toute allure la rue Saint-Honoré… après avoir passé, sans s’y arrêter comme il lui arrivait assez souvent, devant l’Élysée ; mais à ce moment, derrière elle, de la place Beauvau et de la rue des Saussaies, des bicyclettes, des motocyclettes et tous les taxis qu’en quelques secondes les agents avaient pu réquisitionner parmi ceux qui passaient ou stationnaient dans les environs se ruèrent à sa poursuite.

C’est dans ce moment-là aussi que trois messieurs fort solennels descendirent d’une auto devant la grille du ministère et, s’adressant au concierge qui ne voulait pas les laisser passer, déclaraient par la bouche de M. Ditte, doyen de l’École de médecine :

— Monsieur, nous désirerions voir le ministre !

— Oh ! monsieur, c’est absolument impossible pour le moment !… M. le ministre ne peut recevoir personne !… Du reste, ces messieurs sont rentrés en conseil, vient de me dire l’huissier qui m’apportait les ordres.

— Monsieur !… nous sommes délégués par l’Académie des Sciences pour venir examiner la poupée sanglante qui, paraît-il, vient d’être arrêtée !… Cette nouvelle, qui nous a été transmise par les soins de M. le Premier lui-même, doit être exacte, si nous en jugeons d’après l’émoi de tout le quartier !…

— Monsieur, cette nouvelle était exacte il n’y a encore qu’un instant !… mais elle ne l’est plus !… La poupée sanglante vient de sortir d’ici !… c’est moi-même hélas ! qui lui ai ouvert la grille !…

— La poupée sanglante est sortie d’ici ?

— Oui, monsieur ! dans l’auto du ministre !… Je ne pouvais pas prévoir, n’est-ce pas, monsieur ?

— Messieurs, s’écria M. Ditte, je crois que l’on se moque de nous !… Retournons à l’Institut !