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LA MACHINE À ASSASSINER
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Ce fut une séance mémorable qui s’ouvrit par la communication extrêmement modérée dans sa forme et dans ses tendances de M. le président Tirardel.

Certains rentrèrent chez eux sans faux-col ! c’est tout dire !…

Cependant M. Tirardel n’avait rien fait pour exciter les esprits :

— Messieurs ! il nous appartient de calmer l’opinion publique déchaînée par cette nouvelle invraisemblable qu’un de nos sujets les plus notables de l’école, M. Jacques Cotentin (que l’on n’a pas revu depuis) aurait inventé une mécanique dans laquelle il aurait mis le cerveau d’un assassin !… Et cette mécanique lâchée sur le monde continuerait d’assassiner !… Ce qui n’est, naturellement, rassurant pour personne ! Eh bien ! nous sommes des savants ! À nous de dire si, oui ou non, un tel phénomène est possible !… Quelle que soit l’invraisemblance d’une pareille proposition, je vous supplie, mes chers confrères, de discuter la chose sérieusement. Après, nous voterons !…

Il n’y avait là rien de bien méchant pour personne ; cependant un admirateur forcené du professeur Thuillier, bien qu’il eût promis de conserver tout son sang-froid, ne put supporter le ton de légère ironie sur lequel ces choses furent dites, et il s’écria :

— Vous êtes une vieille baderne !…

Consternation générale, puis tapage effrayant. Tous debout :

— Où sommes-nous ? demande, tout pâle, le président Tirardel.

— En France ! lui répliqua-t-on, et ce sont les soi-disant savants comme vous qui font fuir en Amérique les Carrel et autres génies !…

Tonnerre d’applaudissements ! injures !…