Page:Leroux - La Machine à assassiner.djvu/211

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
LA MACHINE À ASSASSINER
207

innocent marguillier dans la mesure où l’on se débarrasse d’un fou. Et M. Bessières l’avait pris au sérieux ! Et il avait pris également au sérieux Mlle Barescat et M. Birouste !

Le revirement de M. Gassier s’était fait dans des conditions qu’il n’est peut-être pas inutile de préciser, car elles nous font voir sous un aspect nouveau et tout de même bien inquiétant la question judiciaire posée par l’aventure de la poupée…

Certains journaux ayant déclaré que l’on serait dans la nécessité de juger à nouveau Bénédict Masson, suivant une procédure qui n’avait été, bien certainement, prévue par aucune loi ni par aucune jurisprudence, la Gazette judiciaire s’éleva aussitôt avec violence contre une pareille prétention !

D’abord, pour la révision du procès, il eût fallu un fait nouveau !… et la sévère Gazette déclarait ne pas l’avoir trouvé dans la nouvelle enquête !

À quoi les adversaires de la Gazette répondaient : « Que vous faut-il donc comme fait nouveau ?… Que peut-il y avoir de plus nouveau dans un procès qu’un innocent condamné à mort et exécuté et revenant plaider son affaire lui-même devant la cour ? »

« Et s’il est coupable ! se récriait l’impétueuse Gazette, que peut-il y avoir, en effet, de plus nouveau que ce guillotiné se représentant devant les magistrats qui se voient dans la nécessité de le faire guillotiner à nouveau !… Eh bien ! cela, mes chers confrères, c’est trop nouveau ! »

C’était en effet tellement nouveau que ceux qui croyaient à la poupée, comme Gassier, reculèrent épouvantés !…

Qu’un événement pareil se produisît, il y aurait une telle révolution dans les mœurs judiciaires, que la société en tremblerait sur sa base !…

… D’abord, c’était la peine de mort devenue impossible, puisque inopérante, comme on dit au Palais et le triomphe