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LA MACHINE À ASSASSINER
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Un sifflement singulier lui répondit…

Elle se sentit presque aussitôt touchée au cou. Une piqûre douloureuse l’arrêta net dans son essor… Et tout de suite, elle fut comme étourdie par la pensée fatale qu’elle aussi pouvait être victime du jeu terrible dont Paris frissonnait encore…

Éperdue, elle appela encore :

— Gabriel ! Gabriel !

Sentant déjà l’alourdissement de son sang dans ses veines, elle fit un effort surhumain pour continuer sa course.

Ainsi elle franchit quelques centaines de mètres et suivit le bois n’ayant pas aperçu Gabriel. Alors elle tomba sur les genoux…

À ses côtés, une grande ombre d’ébène se dressa.

Elle reconnut Sangor qui jetait sur elle son manteau, l’en enveloppait des pieds à la tête et l’emportait dans ses bras comme une enfant… Toute résistance lui était devenue impossible… Elle ne pouvait même plus crier…

Une langueur souveraine et quelque peu enivrante la conduisit aux portes du sommeil…

Quand elle souleva à nouveau ses paupières, une étrange vision faisait mouvoir devant elle des formes tellement précises dans des mouvements si logiques et si réguliers qu’il était impossible de s’arrêter à l’idée d’un songe…

D’abord, tous les sens étaient frappés à la fois par le rythme des danses, la richesse et la singularité des costumes, l’odeur enivrante que répandaient les nuées légères montées des brûle-parfums, par le son bizarre lointain et lancinant d’une musique aux phrases courtes qui finissait par s’imposer à tous les mouvements du corps comme une servitude…

La pièce, grande comme une salle de temple, n’avait