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GASTON LEROUX
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« mode », si bien qu’il ne faut pas s’étonner de ce que Mlle Barescat l’eût priée, ce soir-là, « à sa camomille »…

Aussi bien chacun lui fit fête et il n’est point jusqu’au chat de la mercière qui ne l’accueillît de son plus agréable ronron…

Maintenant il est neuf heures et demie et nous approchons de la minute historique.

— Ma foi, je ne sais pas si nous aurons le bonheur de « posséder » ce soir M. Tannegrin, prononça Mlle Barescat, mais nous ne l’attendrons pas plus longtemps. Tant pis pour les retardataires. Qui veut de ma camomille ?

— Dommage ! fit entendre Mme Camus, la loueuse de chaises, car celui-là est toujours rigolo… Mais, par le froid qu’il fait, il doit avoir son rhumatisme…

Quand on eut ainsi donné un souvenir à M. Tannegrin, ancien clerc d’huissier, défenseur officieux près de la justice de paix et diseur, au dessert, de monologues, on fit fête à la camomille de Mlle Barescat qu’elle savait agrémenter « d’un rien d’anis étoilé », ce qui en faisait, suivant l’appréciation de la loueuse de chaises, « un breuvage exquis ! »

— Le thé énerve et empêche de dormir, disait Mlle Barescat, tandis que la camomille est digestive et bonne pour l’intestin !… quant à l’anis étoilé…

— Nom vulgaire de la badiane, laissa tomber la voix grave de M. Birouste, l’herboriste, plante de la famille des magnoliacées, antispasmodique, galactalogue, stimulante, à recommander pour les flatulences…

— Ah ! vous voilà toujours avec vos grands mots, vous ! releva Mme Camus, qui regrettait l’absence de M. Tannegrin, le diseur de monologues.

— Sans compter que c’est avec ça que l’on fabrique l’anisette ! repartit M. Birouste, qui était un véritable puits de science.