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LA MACHINE À ASSASSINER
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fait la force morale des petits rentiers des Batignolles. Il ne croyait plus qu’à la poupée !…

Comme nous l’avons fait prévoir, cette méthode eut d’excellents résultats, et déjà M. Bessières, bien que l’initiative en eût été prise par son collègue de la préfecture, était le premier à s’en réjouir, quand il vit paraître dans ses bureaux de la rue des Saussaies un homme dont il n’avait pas eu de nouvelles depuis le jour où il l’avait envoyé en mission.

— Ah ! vous voilà, « l’Émissaire » ! s’écria-t-il sur un ton assez joyeux, car ce jour-là il n’y avait pas eu de piqués du tout. Eh bien ! qu’êtes-vous devenu ? Je croyais que la poupée sanglante vous avait mangé ?

— La poupée sanglante ne mange pas, répondit M. Lebouc sur un ton si grave que le directeur de la Sûreté générale en perdit aussitôt le sourire. Du reste, je ne reviens pas ici pour vous entretenir de la poupée !

— Tant mieux 1 Monsieur Lebouc, tant mieux ! moins on en parlera, mieux cela vaudra ! Déjà elle ne pique plus personne. Dans quinze jours, il n’en sera plus question, une autre affaire éclatera et celle-ci sera enterrée. Et je vous prie de croire que ce n’est pas moi qui la regretterai.

— Monsieur le directeur, l’affaire que je vous apporte est autrement grave que celle que nous avions imaginée !

— Mais je n’ai rien imaginé du tout, moi ! Allez dire cela à M. Grassier et à ces messieurs de la place Vendôme !

— Monsieur le directeur, si je suis resté à Corbillères tous ces jours-ci…

— À Corbillères ! Mais on ne vous y a pas vu, à Corbillères ! J’ai demandé de vos nouvelles à tous mes agents, à mes inspecteurs !