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GASTON LEROUX

« On vient de faire à Cordillères une découverte sensationnelle, c’est celle de l’instrument avec lequel Bénédict Masson atteignait ses victimes avant de les étrangler… Il s’agit d’un petit pistolet automatique garni d’un trocart, construit sur le modèle de ceux qui servent en chirurgie et que l’on peut voir dans les vitrines des spécialistes de la rue de l’École-de-Médecine… Ce trocart est une aiguille creuse dans laquelle l’homme de Corbillères introduisait, avant de la lancer, quelques gouttes d’une sorte de poison somnifère qui lui livrait sa victime sans défense… C’est tout ce que l’on peut dire pour le moment, et les experts chimistes ne se sont pas encore prononcés sur la nature précise du liquide employé par Bénédict Masson ; mais voici, de ce fait, bien des choses expliquées : par exemple, l’assassinat sans combat, on peut dire sans résistance, du garde-chasse, le père Violette, qui était cependant un gars autrement solide que le petit relieur de la rue du Saint-Sacrement !…

« Ainsi se trouveraient également expliquées les singulières piqûres à la nuque ou au bras et même à la cuisse, des immolés de Corbillères… piqûres dont la répétition sur chaque cadavre avait intrigué la justice sans qu’elle fût arrivée à leur donner un sens !… Maintenant, on ne peut plus en douter !… Bénédict Masson piquait ses victimes à distance !… »

Ce communiqué, qui devait avoir bientôt une répercussion foudroyante sur la population parisienne, n’apparut réellement avec toute son importance que quelques heures plus tard, quand l’Époque, dans son édition de deux heures, reprit le texte même du communiqué pour lui donner toute sa portée judiciaire :

« Ce que le communiqué oublie de dire, précise l’ « Époque », c’est que les dernières victimes de Corbillères portent, elles aussi, comme le père Violette, cette mystérieuse blessure qui a été faite (on ne saurait plus en douter maintenant après les expériences de la matinée) par le trocart du pistolet automatique ! La poupée sanglante était donc