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GASTON LEROUX

lui… Mais cette promesse, elle ne la tint pas, et, un soir que l’horloger, ne comprenant plus rien à la vanité de ses efforts et poursuivi par l’insomnie, monta dans l’atelier de sa fille il se trouva nez à nez avec Christine qui tenait Gabriel dans ses bras comme un enfant malade :

« — Ah ! je comprends pourquoi il ne m’obéit plus, s’écria-t-il.

« Et dans une de ces crises de désespoir, que seuls connaissent les inventeurs, il brisa, il broya l’œuvre de sa vie !…

« Sa fille était comme folle !… m’a raconté le vieux Norbert. Elle implorait son père pour Gabriel comme elle eût pu le faire pour un être humain :

« — Ne le tue pas !… Ne le tue pas ! lui criait-elle… Mais déjà Gabriel n’était plus qu’un cadavre d’automate.

« C’est sur ces entrefaites que Jacques Cotentin survint et décida, pour calmer sa cousine et son oncle, lequel regrettait déjà son geste assassin, que Gabriel revivrait !… non plus comme une simple mécanique qui n’obéit qu’à des ressorts : mais comme un homme !…

« Depuis quelque temps, du reste, il en nourrissait la pensée. Les travaux auxquels ces deux génies durent se livrer pour réaliser leur création dans l’union de l’art mécanique et de la science physiologique dépassent tout ce que l’on peut imaginer. Mais rien ne les rebutait ! Jacques, du reste, était soutenu par les résultats merveilleux obtenus par des chercheurs dont le but était plus restreint, mais qui, tout de même, sans le savoir, travaillaient pour lui. La vie est un mystère duquel il ne faut jamais désespérer ! On croit qu’elle nous a fuis pour toujours quand elle est encore entre nos mains. Le 10 septembre de l’année dernière le docteur Bedfort Russel, par des massages directs sur le cœur d’un individu mort depuis plusieurs jours, a pu rappeler à la vie un jeune homme qui venait de succomber à une angine infectieuse. Pour y arriver, le chirurgien dut faire une