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LA MACHINE À ASSASSINER
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monde !… mais il suffit quelquefois d’un mot pour vous faire entrevoir la bonne piste !… Je vous écoute…

— Non ! ce n’est pas moi que vous écoutez ! c’est le vieux… Voilà ce qu’il raconte : le Bénédict Masson, comme on le sait depuis le procès, était amoureux de sa fille Christine… Le prosecteur, n’ayant rien trouvé de mieux, puisqu’il lui fallait un cerveau pour mettre dans son automate, que d’y glisser celui qu’on lui apportait à Melun, c’est-à-dire celui de Bénédict Masson, il s’est produit ceci, qui est, en somme, assez logique : le premier geste de l’automate, dès qu’il a donné signe de vie, a été d’emporter Christine… Paraît qu’il s’est jeté dessus comme un sauvage !…

— Je ne ris pas, Lebouc, je ne ris pas !… mais je sens que je deviens abruti de vous entendre me raconter sérieusement des choses pareilles !…

— Je vous parle sérieusement, patron, parce que, depuis bien longtemps, rien ne me fait plus rire, et aussi à cause d’un certain détail qui a bien son importance… Avant de se sauver avec la Christine, la poupée a laissé un mot sur la table… un mot que le vieux a apporté ici… le voilà !… Ce n’est pas long, ce qu’il a écrit : « Je suis innocent ! »

— Bravo ! voilà pour le moins une idée fixe, ou je ne m’y connais pas !…

— Patron !… nous avons d’autres papiers de Bénédict Masson… sur lesquels il a écrit : « Je suis innocent ! »… J’ai fait apporter ici le dossier que nous avons fait venir de Melun depuis que l’affaire de Corbillères, que nous croyions si bien enterrée, ressort de terre, c’est le cas de le dire… les voici !… Eh bien ! comparez !…

— Voyons, Lebouc… En admettant même que ce soit la même écriture… ce qui reste à démontrer… vous n’allez pas me faire croire que ce papier ne date pas d’avant sa mort… Lebouc, vous allez prendre votre retraite, mon ami !…