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LE DERNIER GESTE…

furent cependant de bien beaux crimes — il revint donc sur ses pas, se retrouva dans le jardin, bondit dans le salon, joignit M. Lecamus et Mme Longuet dans le vestibule.

À sa vue, Adolphe et Marceline poussèrent des cris terribles qui ne furent pas entendus de la bonne, laquelle venait de s’absenter justement pour aller acheter du brillant belge.

Une corde était là, provenant de quelque récent déballage. M. Longuet s’en empara et, avant que M. Lecamus ait eu le temps d’opposer la moindre résistance, il était ficelé comme andouille au lampadaire de l’escalier.

Puis, il se précipita sur une panoplie, en détacha un grand sabre recourbé et aussitôt Marceline cria à M. Lecamus :

— Prends garde à tes oreilles !

La généreuse femme, elle, ne pensait, en cette heure tragique, qu’aux oreilles de M. Lecamus[1]. Elle eût mieux fait, hélas ! de songer à sa tête.

Deux secondes plus tard, M. Longuet la lui coupait comme on coupe une tête de veau, sans revenir dans la blessure.

Et, prenant cette tête par les cheveux, il la présenta à M. Lecamus « qui était au comble de l’horreur ».

— Hâte-toi, lui dit-il, de baiser ces lèvres, pendant qu’elles sont encore chaudes !…

Que pouvait faire M. Lecamus, ficelé comme il l’était ? Il n’avait qu’à obéir. Aussi, se hâta-t-il de baiser les lèvres qui, aussitôt après, se mirent à refroidir.

Théophraste grimpa au grenier et en descendit une malle. Il ne fut pas plus de vingt-cinq minutes (le bou-

  1. Ce qui était tout naturel, car elle ne pouvait avoir oublié l’affreux spectacle de l’essorillement de M. Petito.