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COMME IL N’EN EXISTE PAS SUR LA TERRE

tumée au point de repère des sourcils, est celle de la ruse et de la finesse. Elle me dit aussi que je devais avoir le sens des arts, à cause d’une circonvolution roulée en spirale, placée sous la région temporale. Enfin, elle me confia encore avec un gentil sourire de son groin rose, que j’avais l’instinct de la propagation de l’espèce, à cause du développement excessif de mon cervelet (Elle était d’accord, je dois l’avouer, avec Lavater et Gall)

» Je saisis, d’après son discours, que nous devions nous étonner autant, dans notre société, qu’il se trouvât tous les bouchers et tous les tailleurs et tous les artistes qu’il fallait et tous les bottiers, si nous devions nous étonner de cela dans la société sans lois des Talpas, puisque nos lois n’étaient pour rien dans la distribution des états, professions et métiers. Pourquoi ne m’étonnerais-je point, conclut-elle, qu’il y a tous les mâles et toutes les femelles qu’il faut ? La nature fait des bottiers, des littérateurs, des charcutiers de rats, comme elle fait des mâles et des femelles, le tout dans une quantité harmonieuse.

» Ma cervelle continuait à fuir de toutes parts. Je crus avoir un argument décisif et je m’écriai :

» — Pas de loi pour l’État, puisqu’il n’y a pas d’État, pas de loi pour la propriété, puisqu’il n’y a pas de propriété, pas de loi pour les conflits entre individus, résultant de la propriété ; mais pour les conflits résultant des passions ! Si vous avez supprimé l’État et la propriété, vous n’avez pas supprimé les passions !

» Elle me demanda si nous, nous avions des lois qui les suppriment. Je lui répondis :

» — Oïl !

» Il fallut que j’expliquasse ce que c’était que nos lois concernant les passions. Par exemple, un mari est