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LA DOUBLE VIE DE THÉOPHRASTE LONGUET

la plaine unie, ils ne le voyaient pas ! Le facteur enregistrant de la station A était penché sur le corps de son chef et prononça ces mots : « Je crois bien qu’il est mort ! » Tous alors se groupèrent autour du mort et, sur deux branches d’arbre arrachées au bord de la route, couchèrent son cadavre. Ils revinrent ainsi, accompagnant le cadavre porté par deux d’entre eux, vers la station A. N’oublions pas que le train avait passé à la station B et que nul ne l’avait vu à la station A.

Or, ils n’étaient pas arrivés à la station A, que sur la voie, sur la voie qu’ils venaient cependant de parcourir, ils aperçurent un wagon, ou plutôt deux wagons, c’est-à-dire un wagon et le fourgon de queue ! Ces gens poussèrent encore des cris de fou. D’où venait cette queue de train et qu’était devenu le commencement de ce train, c’est-à-dire la locomotive, le tender et trois wagons à couloir ?

Consultez le plan.

C marque le point où, sur la ligne, se sont rencontrées les deux équipes A et B quand elles allaient à la recherche du train, et c’est encore le point où est mort le chef de gare de la station A. Les deux groupes, réunis en un seul, rapportèrent donc le corps vers A, quand sur le point D, point sur lequel ils venaient quelques minutes auparavant de passer et où ils n’avaient rien vu, ils trouvent un wagon et le fourgon de queue.

Je dis que ces gens poussaient des clameurs de fou quand ils aperçurent une tête bizarre qui remuait à la portière. Cette tête n’avait pas d’oreilles et l’homme sans oreilles avait la tête à la portière. Ils le hélèrent. Du plus loin qu’ils le virent, ils lui demandèrent ce qui était arrivé. Mais l’homme ne répondit pas. Chose bizarre, la tête remuait, comme si elle était poussée de droite et de gauche par le vent qui soufflait alors avec une force ap-