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LA DOUBLE VIE DE THÉOPHRASTE LONGUET

et les meilleurs amis du monde. Le souper se prolongea et l’homme, paraît-il (car nous ne voulons rien affirmer quant à ce point si intéressant, mais un peu scabreux de cette véridique histoire), l’homme ne redescendit par le chemin du balcon qu’aux seconds feux de l’aurore. La belle Mme de B… n’en est point à un souper près et, certes, elle ne se fût point plainte de ce souper forcé, qu’elle avait fini par partager de bonne grâce, si elle n’avait été dans la nécessité de conter son aventure au commissaire de police. Et voici dans quelles circonstances. Le commissaire se fit, quelques jours plus tard, annoncer chez Mme de B… Il lui dit que l’anneau qu’elle portait au doigt et sur lequel brillait un diamant magnifique, était la propriété de Mlle Émilienne de Besançon ; qu’elle en ignorait sans doute, elle, Mme de B…, la provenance ; qu’on lui en avait fait cadeau bien certainement. Mais Mlle Émilienne de Besançon, qui avait aperçu la veille, dans une vente de charité, ce diamant au doigt de Mme de B…, le reconnaissait formellement comme sien. Elle en avait fourni, du reste, toutes preuves, et ce diamant avait une monture tout à fait unique qui ne pouvait laisser de doute. Mme de B… se troubla infiniment et dut conter l’aventure qui lui était survenue. Elle parla de l’inconnu, du balcon, du souper et du reste, c’est-à-dire de la reconnaissance que cet inconnu lui avait montrée de son souper, en lui passant au doigt ce diamant magnifique qu’il tenait, dit-il, d’une femme qu’il avait beaucoup aimée, mais qui était morte depuis quelque temps, de Mme de Phalaris. Mme de B… ne pouvait être soupçonnée. Elle fournit une preuve : le revolver au brillant nickel, que l’inconnu avait laissé sur la table de nuit. Enfin, elle pria également le commissaire de police de faire reprendre chez elle cent bouteilles de champagne de premier choix