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LA DOUBLE VIE DE THÉOPHRASTE LONGUET

effet, la forme enroulée d’une petite queue de cochon.) Il appelait le deux : « le gueux ! » Le quatre était flétri par lui de ce mot : « Ah ! la cateau ! » Enfin, il n’aurait pu poser un « blanc » sans annoncer : « la blanchisseuse ! »

Marceline s’amusait beaucoup de ces exclamations patoises, et elle était toujours prête à jouer aux dominos. Théophraste perdait souvent, non point qu’il ignorât le jeu, mais comme le pied de Marceline, sous la table, indiquait au pied d’Adolphe par des pressions réitérées le point qu’il fallait jouer pour gagner, le sort s’en trouvait tout désemparé. Mais c’était un plaisir que de voir perdre Théophraste, attendu qu’il avait au jeu le plus désagréable caractère du monde. Quand il avait perdu, il boudait.

Le soir qui nous occupe, Théophraste venait, ainsi que presque tous les autres soirs, de perdre et, le front méchant, s’était plongé en la lecture des gazettes. Il affectionnait par-dessus tout les « filets » politiques. Il avait des opinions arrêtées. Les barrières qui arrêtaient ses opinions étaient, au nord, « le despotisme des tyrans » et, au sud, « l’utopie socialiste ». Entre l’utopie socialiste et le despotisme des tyrans, il comprenait tout, disait-il, excepté cependant que l’on touchât à l’armée. Il répétait souvent : « Il ne faut pas toucher à l’armée. » C’était un brave homme.

Il lut donc le filet politique, sans le commenter tout haut cependant parce qu’il boudait. Et puis ses yeux furent attirés par ce titre : Cartouche n’est donc pas mort ?

Il ne put s’empêcher de sourire, tant il trouvait cette hypothèse absurde. Et puis il parcourut les premières lignes de l’article et laissa échapper ce mot : « Étrange !… » et cet autre : « Bizarre !… » et cet autre :