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XIX

OÙ L’ON DÉCOUVRE QUE CE PAUVRE THÉOPHRASTE EST ENCORE PLUS À PLAINDRE QUE LES ÉVÉNEMENTS DU DERNIER CHAPITRE N’ONT PU LE FAIRE SUPPOSER.


« Nous n’étions pas au bout de nos peines, » écrit M. Lecamus, qui décidément m’apparaît comme un affreux égoïste. Cette phrase peint tout à fait l’état de son cœur, moins troublé par la douleur excessive qu’entraînait pour son ami la terrible opération que par les cris inharmoniques jaillis de sa bouche édentée.

C’est dans de pareils moments, à des heures aussi exceptionnelles, quand des événements imprévus dérangent la quiétude coutumière des amis que l’on pourrait croire les meilleurs, qu’il faut juger les gens. Voyez M. Lecamus. Il aimait Théophraste, puisqu’il lui eût donné sa bourse, mais il ne lui aurait pas sacrifié son repos. Il lui eût donné sa bourse parce que, jouissant d’une belle aisance, ce geste ne l’eût point dérangé, tandis que cela dérangeait les oreilles de M. Lecamus que Théophraste, pendant son opération, criât si fort.