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M. LONGUET SUBIT LA TORTURE

même au Thibet. Il savait promener, sans hâte et sans fièvre, l’esprit à tuer autour de sa mort. Il le préparait ainsi au trépas. Il l’y amenait. Il lui faisait vivre sa mort jusqu’au moment où il lui faisait mourir sa mort. Alors, à ce moment juste, il fallait, oui, certainement, il fallait le geste d’un Dieu, le geste double qui précipitait à la mort l’esprit mort et ramenait à la vie l’esprit vivant.

Maintenant que nous avons parfaitement compris les données de l’opération et que nous avons assisté aux préliminaires de cette opération, qui ont consisté à faire vivre à Théophraste les derniers mois de la vie de Cartouche, descendons dans le laboratoire où gémit Théophraste sur son lit de sangle, dans le laboratoire qu’éclairent les flammes écarlates et sifflantes ; asseyons-nous aux côtés de M. Lecamus et de cette pauvre Mme Longuet, et qu’une anxiété charitable habite notre cœur.

Nous n’allons plus entendre que la voix impérative de M. de la Nox et la voix douloureuse de Théophraste. Aussi, pour que la moindre petite réflexion étrangère à une scène aussi sublime et aussi criminelle ne vienne nous troubler, nous allons la présenter sous forme d’interrogatoire. Le D. est M. de la Nox, l’R. c’est Théophraste. De cette manière aussi, l’auteur de ces lignes dégage sa responsabilité. Enfin, il ne saurait trop répéter que cet interrogatoire et les incidents qui l’entourent sont purement reproduits d’après la narration qu’en a laissée M. Lecamus.

D. Où te conduit-on, Cartouche ?

R. Dans la salle de la « question ». Mon procès est terminé, je suis condamné à mourir par la roue. Avant le supplice, ils veulent mes aveux, les noms de mes complices, de mes amis, de mes maîtresses. Je me ferais plutôt rouer deux fois ! Ils n’auront rien !…