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M. LONGUET NOUS EN RACONTE « UNE BIEN BONNE »

procéder M. Jean de Courtade, sergent d’affaires de la Compagnie de M. de Chabannes, aidé de quarante hommes, on vit aussitôt cent cinquante sous-officiers et soldats aux gardes-françaises s’enfuir et passer aux colonies[1]. Ils craignaient des révélations ; ils redoutaient que je ne les vendisse ; ils avaient tort, car la torture ne m’a pas fait parler !

» Mais fuyons ces moments funestes pour revenir aux belles nuits de septembre, où nous procédions en gaieté au déménagement des Parisiens. Le régent montra plus de colère encore contre moi et contre M. d’Argenson quand il sut la triste aventure de l’ambassadeur d’Espagne. Songe maintenant à sa furie quand je lui jouai, à lui, le tour suivant : Va-de-Bon Cœur, étant de garde au Palais-Royal, emporta deux flambeaux de vermeil auxquels le duc d’Orléans tenait beaucoup. Rage de Monseigneur. Depuis quelque temps, on volait au Palais-Royal tout ce qui pouvait présenter quelque valeur. Le régent résolut de substituer sans rien dire à l’orfèvrerie d’argent celle en acier ciselé, et particulièrement pour les boucles et les poignées d’épée. Or, le premier jour qu’il en porta une de cette espèce, qu’il avait fait venir de Londres et qui lui coûtait tout de même quinze cents livres, à cause de la beauté merveilleuse du travail, moi Cartouche, je la lui volai à la sortie de l’Opéra. Le lendemain, je lui renvoyai cette poignée d’acier en morceaux, avec un petit billet (tu vois, Adolphe, que je savais écrire) charmant dans lequel je le plaisantais sur son avarice prétendue et lui reprochais à lui, le plus grand Voleur de France, de vouloir empêcher de vivre de malheureux confrères[2]. Il me répondit publique-

  1. Historique.
  2. Historique. — Du reste, il faut que ce soit entendu, une fois pour toutes, c’est une histoire historique. — G. L.