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SI LAZARE AVAIT PARLÉ
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— Elle est tout de même assez grande pour voyager sans vous !

— Elle m’aime trop ! »

Et le vieux diable avait claqué du fouet son bidet, en faisant entendre son vilain rire. Quant à Jacques, il était couché depuis près d’une heure. Sans doute n’avait-il pas eu la patience d’entendre plus longtemps le récit des hallucinations de cette pauvre Marthe.

Il n’avait même point demandé à sa femme ce qu’elle comptait faire de sa visiteuse nocturne, ni si elle allait la faire reconduire chez elle, ni si elle allait lui offrir l’hospitalité. Après avoir ramassé lui-même les morceaux du service qu’il avait si maladroitement brisé, il s’était esquivé à l’anglaise.

La chambre de Jacques n’était séparée de celle de Fanny que par le boudoir privé. Fanny, avant de sonner sa femme de chambre, frappa à la porte de son mari. Elle sentait un besoin impérieux de lui parler. Elle voulait lui communiquer surtout les dernières confidences de Marthe qu’elle estimait d’importance… Mais elle avait beau frapper, on ne lui répondait pas. Elle trouva bizarre que Jacques se fût si vite endormi et qu’il n’eût pas eu la curiosité de l’attendre, après la singulière démarche et les contes fantastiques de la petite Saint-Firmin.

Elle tourna tout doucement la clenche et ouvrit la porte.

« Vous dormez ? » demanda-t-elle à voix basse.

Seul, le bruit d’une respiration régulière lui répondit au fond de l’obscurité.