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FANNY ET LE JOURNALISTE
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visionnaire que l’on dit, on ne saurait négliger son témoignage, et quant à moi, je ne manquerai pas, madame, en sortant d’ici, de l’aller interroger.

— Mais c’est fou, monsieur !…

— Je vous demande pardon, je ne connais pas Mme Saint-Firmin…

— Eh ! monsieur, fit Mme de la Bossière, en essayant de dominer l’irritation singulière où l’avaient jetée les dernières paroles de l’indiscret reporter…, quand vous connaîtrez Mme Saint-Firmin, vous vous rendrez compte que ses propos n’ont pas plus d’importance que ceux de Mlle Hélier !… Ce sont deux toquées, ni plus ni moins ! L’état de santé de Mme Saint-Firmin est des plus précaires, et il n’est point rare de l’entendre divaguer. Le Dr Moutier lui-même a ri des visions de Mme Saint-Firmin et en a établi l’inanité. Comme le disait Moutier, elle s’imagine voir la nuit ce que sa cervelle malade a conçu pendant le jour ! Ne voit-elle pas — et c’est certainement la première chose qu’elle vous dira — ne voit-elle pas le cadavre de mon malheureux beau-frère dans une malle !

— Oh ! très intéressant ! interrompit le petit Darbois… Très fortes les somnambules pour les cadavres dans les malles !

— Et savez-vous pourquoi, monsieur ? tout simplement parce que le Dr Moutier, qui a déposé lors de l’affaire Eyraud-Gabrielle Bompard, a raconté cent fois devant cette petite (Mme Saint-Firmin est restée presque une enfant) l’histoire de la malle de Gouffé !