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que le bien. Car, quant aux êtres sur lesquels s’exerce la propriété, il ne les compte pour rien, et ne craint pas de les asservir. Mais il se trompe lorsqu’il regarde la propriété comme ne pouvant lui faire que du bien. Car cette propriété peut augmenter ou diminuer ; cette propriété peut donc être insuffisante. En voulant la propriété à son profit, l’homme la constitue par là même chez les autres. Voilà donc des limites infranchissables qu’il se donne à lui-même : en se faisant propriétaire, il se fait esclave ; car il abdique par là même son droit à la jouissance de tout ce qui excède sa propriété. Sa propriété devient le signe représentatif de sa valeur ; et sa virtualité, représentée par sa propriété, en dépend par conséquent, et est limitée par elle. Il devient donc, par le fait de la supériorité de ses désirs sur les choses dont il dispose, l’esclave de ces choses mêmes auxquelles il s’attache. En outre, la guerre avec les hommes revient encore par ce côté. Car derrière cette propriété sont des hommes. Ceux qui ont un gros bagage de propriété sont les puissants ; ceux qui en ont un petit, ou qui n’en ont pas, sont trop faibles pour n’être pas esclaves. Ainsi cette famille, cette patrie, cette propriété, qui ont été inventées pour le bien de l’homme, et sans lesquelles même il ne saurait vivre, peuvent devenir un mal pour lui ; et ce qui devait lui donner