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abstrayait-il pas l’homme de l’humanité, aussi complètement au moins que son rival, lui qui imaginait que l’homme, avant de recevoir des sensations du monde extérieur, n’était en essence qu’une table rase, sans innéité, sans spontanéité aucune ? Spinoza, en abîmant le rêveur solitaire de son maître Descartes dans la substance divine, sans intermédiaire ; Malebranche, cet autre disciple de Descartes, en arrivant à peu près aux mêmes conséquences ; Berkeley, en déduisant de son maître Locke, un système analogue ; Hume enfin, en concluant de leurs travaux divers un scepticisme universel, ont tous travaillé sur l’homme solitaire et abstrait dont je cherche en ce moment la définition. Leibnitz, plus grand peut-être mais assurément plus universel qu’eux tous, tout doué qu’il fût du sentiment de l’infinité, du sentiment du rapport et de la coexistence de toutes choses, a bien été obligé de les suivre sur ce terrain de l’abstraction. Et qu’a fait Kant après eux, et qu’ont fait après Kant ses successeurs en Allemagne ? Enfin que sont venus faire, à la suite de tous ces maîtres, les pâles disciples, les inconséquents écoliers, qui, dans ces derniers temps, ont voulu mettre la France au pur régime de la psychologie ? C’est toujours le moi, toujours l’homme solitaire, qu’ils ont mis à l’étude, c’est-à-dire ce qui