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CONFITOU

une si belle campagne, d’en vouloir à Freda ? Il trouvait sa femme plutôt à plaindre. Alors, il était loin de soupçonner qu’il pût jamais, pour des faits dont il ne la jugeait pas responsable, changer de sentiments vis-à-vis d’une personne qu’il aimait et qu’il estimait depuis dix ans. Alors, il était orgueilleusement persuadé que rien au monde n’était capable d’ébranler le bel équilibre de son équité. Et cependant, peu à peu, cet événement formidable s’était accompli.

Maintenant qu’il voyait clair dans sa cave, où venait d’éclater l’obus de Charleroi, il comprenait qu’il avait commencé à « changer » quand il avait commencé à avoir des craintes sur la facilité de notre victoire… Mon Dieu ! en y réfléchissant bien, il pouvait préciser le jour et peut-être l’heure. L’heure devait être trois heures de l’après-midi ou onze heures du soir, l’heure des communiqués… et le jour, eh bien ! ce jour-là avait été le jour de Morhange ! … Oui !… quand on avait perdu Morhange… après une si belle avance !… les consolations de sa femme l’avaient énervé…

C’est qu’à Morhange il avait senti que c’était La première fois que l’on entrait véritablement en contact avec le monstre !…