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CONFITOU

ans ! Il s’appliquait à penser que ce n’était pas une Prussienne ; et, certes, qu’elle ne fût point cela, il ne trouvait pas cette consolation si ridicule ! D’abord, jamais une Berlinoise, se disait-il, n’eût pu offrir aux yeux d’un mari, après dix ans de ménage et la maternité, dans le désordre de ce sommeil matinal, des lignes aussi pures et aussi délicates, ce teint de lait, cet ovale charmant du visage qui ne rappelait en rien le type classique de la Gretchen. Le nez et la bouche avaient une finesse toute parisienne qui ne se trouve absolument pas en Allemagne, excepté, quelquefois, à Dresde, patrie des « petits saxes ». C’était une Dresdoise.

Jamais les Dresdoises, pensait-il, n’ont comploté de conquérir le monde. Berlin envoie ses femmes dans tous les bazars de l’étranger : Dresde les garde. Et il avait dû aller chercher celle-là dans la joyeuse capitale du vieux royaume d’Auguste le Fort, après l’avoir rencontrée, bien par hasard, aux fêtes du centenaire de Kant, à Kœnigsberg, où un groupe des « Combattants de la Paix » l’avait expédié, un peu malgré lui. Tout de suite, ils s’étaient aimés, malgré la grande différence d’âge. Elle avait été très heureuse d’épouser ce Français célèbre, et lui s’était épris, tous les jours davan-