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CONFITOU
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— Non ! souffla-t-elle… oh ! non !… Il y en a qui s’en vont, mais moi je reste avec vous. Il ne s’agit pas de cela, mais de mon fils…

— Vous en avez de mauvaises nouvelles ?

— Il est ici. Il s’est sauvé de son collège. Il a seize ans depuis hier. Il veut s’engager. Il est venu me dire adieu. Il est fou. Je n’ai plus d’espoir qu’en vous. Je vous l’ai amené. J’ai voulu qu’il voie les blessés. Je l’ai fait passer à travers les salles. Je lui ai montré tous ces malheureux, dont deux agonisent ; et les autres, qui n’ont plus qu’un bras ou qu’une jambe. Je lui ai dit : « Voilà ce qu’en a fait le champ de bataille ». Il m’a répondu : « Il en a fait des héros ! »

— Et qu’est-ce que vous avez répondu, vous ?

— Rien ! Que voulez-vous que je lui dise ? Il ne m’entend même pas. C’est comme si je n’étais plus sa mère. Il me regarde avec pitié.

Si je m’attendais à celle-là ! je n’ai pas toujours été heureuse dans ma vie, mais je prenais mon parti de tout ; j’avais pris même mon parti de trouver mon enfant trop sérieux pour son âge, trop grave quand je ne demandais qu’à rire avec lui, avec lui que je n’ai vu sourire que si rarement, et avec le sourire, hélas !