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CONFITOU
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Freda aurait dû être avertie qu’elle faisait fausse route. Elle répliqua avec âpreté :

— Eh ! je ne pouvais pas, non plus, laisser traiter d’assassins mon frère et mon oncle, et toute ma famille !… Eux aussi sont dans l’armée allemande, mais tu les connais ! Tu ne me diras pas que Fritz ou Moritz passent leur temps, après la bataille, à couper les mains des petites filles, à arroser de pétrole les maisons ou à violer la demoiselle du bourgmestre ! Tu sais bien que ce sont de braves gens !… Eh bien ! ils ne sont pas une exception ! Il y en a des millions comme ça !… Alors ?… alors tu vois bien que tout ça, ça n’est pas vrai !… Eux aussi, ils ont leur honneur !…

— Non ! répondit tout net le professeur.

Elle se redressa, cessa de pleurer, le considéra quelques instants avec stupeur.

— J’ai bien entendu ? répéta-t-elle tout bas, comme si elle n’avait plus la force de parler. C’est toi, toi, Raucoux-Desmares, qui parles ainsi !…

Il ne répondit pas… Elle le vit extraordinairement froid et lointain… oh ! si lointain qu’elle s’épouvanta immédiatement. Il lui sembla que cet homme, tout à coup, ne la connaissait plus. Alors, elle se rapprocha de cette statue avec