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BALAOO

Et deux syllabes glissèrent entre ses lèvres exsangues.

— Papa !…

Coriolis tomba à genoux devant son enfant, souleva cette tête chérie, la pressa sur son cœur et l’arrosa de ses larmes.

— Pardon !… Pardon !…

— Pardon de quoi, mon papa ?… Balaoo ne t’a rien dit ? Embrasse-le… c’est lui qui m’a sauvée !…

Le regard de Coriolis allait de Madeleine à Balaoo qui, sur le seuil, détournait la tête pour qu’on ne le vît pas pleurer.

— Comment ! Il t’a sauvée ?

Alors, Madeleine, entourant de ses beaux bras tremblants le cou de son père, lui confia la terrible histoire à l’oreille : l’enlèvement dans la chambre de Moulins par Élie, l’Albinos…

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Le fils de la mère Vautrin avait dû apprendre le mariage de celle qu’il n’avait cessé d’aimer et la prochaine arrivée des nouveaux époux à Clermont-Ferrand. La résolution qu’il avait prise subitement d’aller se mettre sur leur route, comme une bête à l’affût pour se jeter sur sa proie, au passage, en disait long sur la mentalité des Trois Individus, qui, depuis des années, chassés définitivement de la société des hommes par leur condamnation à mort, vivaient au fond de la forêt comme des animaux sauvages.

Mais, si Hubert et Siméon ne vivaient plus que pour manger et pour respirer au creux de leur tanière, le cœur d’Élie s’animait encore de temps à autre, farouchement, au souvenir d’une forme blanche, apparue jadis, quand il rentrait le matin de ses chasses clandestines, au seuil de