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BALAOO

l’on n’avait réussi qu’à augmenter, semblait-il bien, sa rage. Abrité derrière les échafaudages, il se mit à lancer des projectiles sur la foule.

Ce fut une véritable pluie de pierres qui s’abattit, frappa, blessa, tua. Les abords de la rue de Rivoli et du square Saint-Jacques furent ainsi vite nettoyés par le monstre. La troupe et les agents eux-mêmes durent reculer. Pour se défendre, l’anthropopithèque démolissait la tour Saint-Jacques !

Et cela avec une telle rapidité qu’il y eut des loustics (il y en a toujours pour faire de l’esprit quand on ne leur demande rien) pour prétendre qu’avec trois ou quatre jours de ce siège, il ne resterait plus de la tour Saint-Jacques que ses échafaudages !

C’était bien exagéré ! Mais enfin, il ne faisait point de doute que les plus belles gargouilles gisaient en miettes sur la chaussée et qu’à tout prendre, le monstre allait plus vite à démolir le fameux monument que les ingénieurs de la ville à le réparer.

Et cela dura toute la nuit.

Au matin, M. Mathieu de la Fosse arriva avec les cinq agents qui traînaient toujours M. Coriolis Saint-Aubin. Le nouveau Préfet de police était dans un état pour le moins aussi lamentable que l’ex-consul de Batavia lui-même. Il avait moins de désespoir et de douleur, mais plus d’exaspération. Une sorte de fatalité diabolique paraissait attachée à sa carrière et il ne pouvait mieux comparer les difficultés actuelles, singulières et tragiques, qu’aux événements inouïs du siège des Bois Noirs, alors qu’il était préfet du Puy-de-Dôme.

Derrière le groupe, suivait un énorme monsieur tout guêtré de cuir fauve et portant sur l’épaule une carabine.