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BALAOO

mant cadre noir à la tête formidable de Balaoo qui les regarde !…

Patrice a fait le geste qui les délivrera. Son bras s’est détendu comme un ressort, son bras armé du revolver, et c’est en vain que Madeleine lui a jeté le cri de sa pitié suprême !

— Ne tire pas !

Patrice a tiré entre les deux yeux…

Le train fait un tel bruit de tonnerre sous ce tunnel qu’ils ont été les seuls à entendre le coup de feu qui doit tuer Balaoo.

C’est avec tous les signes du désespoir que Madeleine regarde… Elle a voulu se jeter sur la glace, ouvrir la portière, au risque de se faire écraser sous le tunnel. Patrice doit user de toutes ses forces pour la retenir, et maintenant, ils assistent, haletants, au drame qui se passe derrière la glace…

La balle a fait un petit rond bien net dans la glace de la portière et un autre petit rond moins net à cause du sang à la naissance du nez de Balaoo…, derrière la portière à laquelle, désespérément, il s’accroche, Balaoo regarde Madeleine de ses yeux qui se ferment… et jamais Madeleine n’a vu, même dans les yeux des meilleures bêtes, un regard plus humain, au moment de mourir… même dans les yeux des chiens de chasse quand ils meurent entre les bras de leurs maîtres qui les ont frappés par maladresse… Et Balaoo lâche la portière et disparaît dans le trou noir retentissant.

Madeleine étouffe. Mais Patrice commence à respirer.

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Or, c’est dans le moment que l’on se croit enfin à l’abri du sort que celui-ci se retourne contre vous avec la cruauté