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BALAOO

— Ah ! ah ! il a perdu la piste !… mais il ne t’a pas suivie, surtout, tu en es sûre ?…

— C’est moi qui le suivais… je m’étais jetée dans un fiacre… ah ! c’est affreux… affreux !… Il est comme fou !…

— Mais fou de quoi ? interrogeait Patrice, au comble de l’exaspération.

— Fou de Madeleine !… Veux-tu le savoir, là !… Oui, il est amoureux fou de ta femme !… Il lui fait des vers, là, es-tu content ?…

— Et c’est parce qu’un monsieur fait des vers à Madeleine que vous êtes dans un état pareil ?… Mais qu’il vienne donc, ce garçon-là, je lui parlerai : en voilà une histoire !…

Et Patrice montra ses poings ; Coriolis haussa les épaules.

— Mais qu’est-ce que ça peut bien nous faire, Noël ? répéta, avec rage, le malheureux jeune homme, éperdu à cause de cette bombe inexplicable qui éclatait au milieu de son bonheur tout neuf !

Hélas ! personne ne s’occupait de Patrice.

Fébrilement, ne sachant à quoi se résoudre, après avoir précautionneusement fermé portes et fenêtres, les autres interrogeaient Zoé qui racontait, par petites phrases hachées et coupées de sanglots, une histoire si fantastique, que Patrice pût se demander s’il ne rêvait point qu’il était tombé dans un asile d’aliénés où les mots que l’on entend n’ont plus de sens même pour ceux qui les prononcent.

« C’est à croire, soupirait Zoé, qu’il faisait l’ivre-mort exprès pour qu’on ne s’occupât pas de lui ; il a été si vite debout, tout à coup, ce matin, et si vite habillé ! toilette tapageuse ! pan ! pan ! coups de pied dans l’armoire,