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BALAOO

— Ils veulent le tuer parce qu’il a mal parlé aux juges… C’est pas encore ça qui avancera leurs affaires. On n’est jamais tranquille avec eux. Moi, je commence à en avoir assez ! c’est assez de crimes comme ça !

— Oui ! oui ! souffle Balaoo, exténué de ses derniers travaux de pendaison ; assez de crimes comme ça !… Où vas-tu, Zoé ?…

Je rentre dans la carrière… Voilà deux nuits que je n’ai pas dormi… Bonsoir, Balaoo !…

Et Zoé, malgré la pleine lune qui l’éclairait, disparut soudain aux yeux du docteur, comme si la terre l’avait engloutie.

Au milieu de cet épouvantable cauchemar, le docteur Honorat entendait sonner et résonner à son oreille cette phrase : « Assez de crimes comme ça ! » Zoé l’avait dite et était partie, mais M. Noël l’avait répétée et était resté. Qu’est-ce que ça pouvait bien être que ce particulier-là qui se promenait si aisément sur les cimes de la forêt, les mains dans les poches. Il fallait que les Trois Frères eussent bien confiance en lui pour ne lui cacher aucun de leurs secrets !

Sur ces entrefaites, il entendit M. Noël qui disait tout haut :

— Zoé ? Zoé ? Eh bien ! et le docteur ? Tu le laisses tout seul ?

La voix de Zoé monta tout près de lui, d’un petit buisson qui n’eût pu cacher un couple de lézards. Zoé devait être sous la terre.

— Laisse donc ! on lui a fait un nœud de braconnier… Bonsoir, Balaoo !…

Et, à partir de ce moment, un silence énorme recommença sous la lune.