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BALAOO

Delafosse posa des questions à Zoé. Il était pâle et mordait sa moustache.

— Qu’est-ce que tu nous apportes-là, malheureuse ?

— C’est un petit doigt du docteur Honorat, répondit la placide Zoé.

— Tes frères ont coupé un doigt au docteur ?

— Dame ! ce n’est point le vôtre, monsieur le Préfet, ou le mien !

— Oh ! c’est bien le petit doigt du docteur Honorat !

— Je le reconnais, dit le Maire, et il montra la bague en or qu’on avait laissée à la phalange comme pour en attester l’authenticité.

— Mais c’est abominable ! exprima le Préfet, de plus en plus pâle.

— Pourquoi qu’ils ne couperaient pas un doigt à ceux qui veulent leur couper la tête ? expliqua Zoé, logique.

— Et pourrais-tu me dire, petite misérable, pourquoi ils ont commis cette cruauté effroyable ?

— Ils disent comme ça que c’est pour bien vous prouver qu’ils sont prêts à tout avec le docteur Honorat si le Président de la République ne leur donne pas leur grâce. Ils m’ont dit de vous dire qu’ils donnaient au Président de la République jusqu’à demain midi tapant. Si demain à midi tapant le Président ne les a pas graciés, ils couperont l’autre petit doigt du docteur pour vous faire réfléchir encore. Je vous répète ce qu’ils m’ont dit. Enfin, après-demain, ils le tueront tout à fait, et vous en enverront les morceaux, et ils reprendront leur liberté, et vous serez responsable de tout ce qui pourra arriver… J’ai pas autre chose à vous dire. Est-ce que je peux m’en retourner ?

À ce moment, on apporta au Préfet une officielle. C’était