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BALAOO

— Surtout qu’ils ne le fassent pas souffrir !…

— Ah ! il est attaché pour qu’il ne se sauve pas ! En dehors de ça, on ne s’occupe pas de lui !

— On lui donne à manger, au moins ?

— Ah ! ce matin, on lui a poussé son morceau ; mais probable qu’il n’a pas faim, il n’a pas touché à son écuelle… Alors, c’est tout ce que vous avez à me dire ?…Eh bien ! au revoir, messieurs, la compagnie, à tantôt !…

Et elle s’en retourna, dans sa robe d’impératrice, sans que nul osât faire allusion à la manière dont elle avait pu se procurer cette somptueuse toilette. Personne n’eût voulu se mettre mal avec les Vautrin… Il y eut même quelques voix pour vanter la belle mine de Zoé dans ses falbalas. Quelqu’un dit : « Ça lui va rudement bien !… »

Elle disparut comme elle était venue, toute droite, hautaine comme une dame, ne daignant point se retourner, balayant toute la poussière de la route…

… De l’autre côté de la haute futaie de Pierrefeu, le colonel de Briage avait échelonné ses hommes, mais hésitait à pénétrer dans les bois. En fait, il mettait de la mauvaise volonté à accomplir cette besogne de police. Il avait répondu au vicomte de Terrenoire qui, à la tête de son escadron, allait d’un bout à l’autre du pays, reliant les diverses unités de cette étrange armée de siège, qu’il voulait s’entretenir tout d’abord avec le Préfet, car il entendait repousser dans l’affaire la plus petite responsabilité.

L’épisode de l’ambassade de Zoé devait retarder encore les opérations. Le préfet télégraphia au ministère de l’Intérieur, et on attendit la réponse du Ministre qui n’était pas encore arrivée à trois heures.

À trois heures, en revanche, Zoé réapparut sur la lisière de la forêt, toujours en impératrice.